Le litige opposait la société Ryanair Ltd à la société PR Aviation BV, qui exploite un site web comparateur de prix et de vols de compagnies aériennes. Les données de ce site sont alimentées de façon automatique, notamment par une base de données couplée au site internet de Ryanair, dont PR Aviation BV réutilisait ainsi les données.

Pour sa part, Ryanair exploite un site internet sur lequel les internautes peuvent rechercher, consulter et passer commande en ligne de billets d’avion auprès par cette compagnie. Le site de Ryanair contient des conditions générales d’utilisation (CGU), soumises à l’acceptation des utilisateurs.

Ces CGU interdisent une utilisation commerciale des données du site et limitent les utilisations autorisées des données et du site à un certain nombre d’usages limitativement énumérés, à des fins privées et non commerciales uniquement. Il était notamment stipulé dans les CGU que l’utilisation de systèmes automatisés ou de logiciels pour extraire des données du site à des fins commerciales est interdite, à moins que Ryanair ne l’ait expressément autorisé par convention de licence écrite.

Cependant, la base de données de Ryanair n’a pas été considérée comme remplissant les conditions requises pour bénéficier du droit sui generis du producteur de base de données, à savoir principalement un investissement substantiel dans la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de la base. Or, en vertu du ce droit sui generis, le producteur de la base peut interdire dans certaines conditions les réutilisations et extractions du contenu de sa base.

La base du site Ryanair ne bénéficie pas non plus de la protection par le droit d’auteur.

La question préjudicielle posée à la Cour européenne était principalement de savoir s’il est possible de limiter par contrat (en l’occurrence, par des conditions générales d’utilisation) les utilisations qui peuvent être faites des données, alors que la base et son contenu ne sont pas protégés par des droits de propriété intellectuelle.

La Cour répond par l’affirmative :

« les articles 6, § 1, 8 et 15 de la directive 96/9, qui instituent des droits revêtant un caractère impératif en faveur des utilisateurs légitimes d’une base de données, ne sont pas applicables à une base de données qui n’est protégée ni par le droit d’auteur ni par le droit sui generis en vertu de ladite directive, de sorte que celle-ci ne fait pas obstacle à l’adoption de clauses contractuelles ayant pour objet les conditions d’utilisation d’une telle base de données ».

La Cour précise ainsi que les exceptions prévues par la directive (que l’on peut retrouver dans le Code de la propriété intellectuelle français) au monopole de l’auteur d’une base de données originale protégée par le droit d’auteur, de même que les actes autorisés pour l’utilisateur d’une base de données protégée par le droit sui generis (telles que les extractions de parties non substantielles) ne sont pas applicables dès lors que la base n’est pas protégée par le droit d’auteur et par le droit sui generis du producteur.

Elle conclut que :

« La directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données, doit être interprétée en ce sens qu’elle n’est pas applicable à une base de données qui n’est protégée ni par le droit d’auteur ni par le droit sui generis en vertu de cette directive, si bien que les articles 6, paragraphe 1, 8 et 15 de ladite directive ne font pas obstacle à ce que le créateur d’une telle base de données établisse des limitations contractuelles à l’utilisation de celle-ci par des tiers, sans préjudice du droit national applicable ».

Il est donc bien possible, sous réserve des dispositions du droit national, d’organiser par contrat (des CGV ou des CGU par exemple, lorsque la base de données est consultable sur un site internet) les conditions dans lesquelles le propriétaire de la base autorise les tiers à l’utiliser.

Celui qui aura accepté les conditions contractuelles d’utilisation devra par conséquent s’y soumettre, sauf à risquer de voir sa responsabilité contractuelle engagée.

Pour plus de détails, consulter l’arrêt sur le site de la CJUE.