Cet arrêt réaffirme l’importance du devoir d’information et de conseil qui pèse sur les prestataires de services informatiques et développeurs à l’égard de leurs clients, même s’il n’est pas expressément prévu dans le contrat.

Un hôtel avait commandé à une société la refonte de son site internet, incluant la mise en place d’un module e-commerce et des fonctionnalités de réservation de chambres avec paiement en ligne. Le bon de commande précisait, au sujet du paiement en ligne, « paiement sécurisé » et « cryptage SSL ».

Pour l’hôtel, la prestation relative au paiement en ligne incluait tout ce qui était nécessaire pour le bon fonctionnement opérationnel de cette fonctionnalité, et pour que les paiements puissent avoir lieu de façon automatisée.

Le prestataire, lui, estimait que l’interconnexion du logiciel de réservation avec le serveur de la banque n’était pas incluse dans la prestation, laquelle se limitait à recueillir les coordonnées de carte bancaire des clients et les transférer de manière cryptée sur le serveur de l’hôtel, ce dernier devant les enregistrer manuellement sur son terminal de paiement pour donner l’ordre de paiement à la banque. Cette fonctionnalité d’interconnexion devant faire l’objet d’un développement spécifique, non compris dans le prix indiqué sur le bon de commande.

Insatisfait, l’hôtel a refusé de payer le solde des factures du prestataire, qui l’a assigné en paiement. Le prestataire a obtenu gain de cause devant le tribunal de commerce, mais la cour d’appel a réformé le jugement et l’a condamné pour manquement à son devoir de conseil à l’égard du client.

Selon la cour, il appartenait au prestataire, au titre de son devoir de conseil :

« non seulement d’informer son client des limites de sa prestation et donc des restrictions concernant les fonctionnalités du logiciel »,

« mais également de se renseigner sur les besoins de son client et de l’aider à exprimer ses besoins afin de l’orienter au mieux dans ses choix et de lui faire connaître, le cas échéant, la nécessité de souscrire un contrat auprès d’un tiers pour obtenir ladite fonctionnalité ».

La cour souligne que le client, professionnel de l’hôtellerie, n’a pas de compétences spécifiques en matière d’informatique, et qu’il pouvait ainsi croire que les termes « paiement sécurisé » et « cryptage SSL » incluaient la fonctionnalité d’interconnexion avec le serveur de la banque.

Le prestataire aurait dû l’informer clairement de ce qui était compris ou non dans la prestation, d’autant que le module de paiement en ligne était essentiel pour le client.

Les magistrats écartent l’argument du prestataire selon lequel le client ne l’a pas informé du besoin spécifique d’interconnexion avec le serveur de la banque, alors que les conditions générales de vente (CGV) jointes au bon de commande stipulaient une obligation pour le client d’informer le prestataire de l’ensemble de ses besoins spécifiques. Pour la cour, cette clause ne peut avoir pour effet de restreindre le devoir de conseil du prestataire, mais seulement de limiter la garantie de conformité concernant les besoins spécifiques du client à ceux formulés par écrit au moment de la signature du bon de commande.

Considérant que le prestataire n’a pas respecté son devoir de conseil, la cour prononce la résolution du contrat pour défaut de délivrance conforme et condamne le prestataire à rembourser les sommes que le client lui a versées, ainsi qu’une indemnité pour les frais irrépétibles liés à l’action en justice.

Source : www.legalis.net.